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Y a-t-il eu faute morale dans l’établissement des traductions du missel de 1969 ?

On nous dit que, puisque l’Eglise n’avait pas légiféré en matière de traduction liturgique, le traducteur était libre de faire comme il le voulait.

C'est faux.

Et cela dénote un mauvais comportement moral du traducteur.

Que les traductions liturgiques établies immédiatement après la parution du missel de Paul VI soient infidèles, personne ne le nie aujourd’hui : elles sont des adaptations.
Ce qui est en question actuellement, c’est la légitimité d’un tel procédé. On nous dit que, puisque l’Eglise n’avait pas légiféré en matière de traduction liturgique, le traducteur était libre de faire comme il le voulait.
Cet argument est faux, pour trois raisons.

D’abord, il suppose que le traducteur pouvait ne pas être… un traducteur ! Or nulle part, en parlant de la liturgie en langues vernaculaires, l’Eglise n’avait parlé d’adaptation au moment de la traduction.

Ensuite cet argument va contre la nature de la liturgie, qui est d’être reçue, et non fabriquée. On peut nous rétorquer que cet axiome a été avancé par Benoît XVI, après qu’aient eu lieu les traductions en question. De cet axiome découle le principe que les traductions ne sont pas le lieu de l’adaptation. Mais que cet axiome, qui est relatif à la liturgie, n’ait pas été formulé tel quel à l’époque des traductions, n’implique pas qu’il aurait pu être méconnu.
Tout cela témoigne d’un très faible niveau de connaissance de l’être même de la liturgie par le traducteur. – On sait que celui-ci était un appareil lourd, incluant tous les évêques francophones et leurs conférences, des spécialistes de la liturgie, du latin, de la littérature, le tout en une cascade d’associations et de commissions. – On peut voir à cela, comme je l’ai fait dans une tribune publiée dans l’Homme Nouveau, une circonstance atténuante dans le fait que la question des traductions liturgiques officielles était nouvelle dans l’Eglise. Mais les trois évêques qui ont voulu me répondre ont souligné, contre cette circonstance atténuante, que la question des traductions liturgiques n’était pas nouvelle dans l’Eglise, on s’y était attelé depuis longtemps… Mais les traductions officielles étaient bien un phénomène récent.

Enfin, cet argument ne tient pas compte du droit des fidèles. Ceux-ci sont du rite romain, ils ont droit à ce qu’on leur présente, sans altération, la spiritualité qui s’exprime dans les textes du missel romain. Là encore, on a formulé par la suite un principe qui eût dû être évident pour les liturgistes participant au processus de traduction : nul n’a le droit de modifier la liturgie de son propre chef, sinon l’autorité légitime du rite en question. Et pour le rite romain, l’autorité légitime c’est l’évêque de Rome, c’est-à-dire le Pape.

Comment donc qualifier la faute du traducteur ? On voit qu’il y a une méconnaissance de la nature de la liturgie, qui peut s’expliquer par le fait que la science liturgique est une science relativement jeune dans l’Eglise catholique : la liturgie, on en vivait, on n’en faisait pas la théorie. La science liturgique, en son cœur, ne se confond pas avec la connaissance des rubriques, ni avec l’histoire de la liturgie, même si elle les suppose. Les principes que nous avons rappelés ici font partie de ce cœur de la science liturgique, qui veulent que la liturgie ne soit pas fabriquée, mais reçue ; que les traductions ne sont pas le lieu de l’adaptation ; que personne ne peut de son propre chef adapter la liturgie à la subjectivité d’un individu ou d’un groupe. Il semble donc bien y avoir eu une dose d’orgueil chez ces spécialistes qui ont exagéré l’état de leur science.
Mais il y a indéniablement une autre dimension, qui apparaît quand on examine quelles adaptations ont été faites. On a parlé à ce propos d’idéologie. Le traducteur, ou ceux qui en tiraient les ficelles, ont voulu mettre leur idéologie à la place de certaines affirmations claires de la doctrine catholique, par exemple au sujet du sacerdoce, précisément le rôle particulier du prêtre à la messe, ou encore au sujet du sacrifice. Il y a mensonge à ce niveau-là. Car l’idéologie dont on a voulu se rapprocher, c’est le protestantisme.

Abbé Bernard Pellabeuf

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